/ ACTUALITE TRANSPORT / LA PERTE DE SALAIRES EST DÉSORMAIS INDEMNISABLE PAR LES TRANSPORTEURS AÉRIENS : CJUE, 29 JUILLET 2019 (aff. C-354/18)

LA PERTE DE SALAIRES EST DÉSORMAIS INDEMNISABLE PAR LES TRANSPORTEURS AÉRIENS : CJUE, 29 JUILLET 2019 (aff. C-354/18)

Le Règlement européen n°261/2004 régit la responsabilité des transporteurs aériens en cas de perturbations de vols. Ce texte européen comporte une liste détaillée des devoirs et obligations des compagnies aériennes envers leurs passagers et met en place un système de compensation forfaitaire pour assurer une protection fondamentale en cas de retard, d’annulation de surbooking ou de refus d’embarquement.

En fonction des circonstances et aux conditions bien fixées dans le Règlement, le passager a droit à une indemnisation dont le montant peut varier entre 250 € et 600 € par personne.

Le montant de cette indemnisation varie notamment en fonction de la distance du vol.

si la distance du vol est inférieure à 1500 km, l’indemnisation est de 250 € pour un vol retardé.
si la distance est comprise entre 1500 km et 3500 km, ou plus de 1500 km pour les vols intracommunautaires, la compensation est de 400 €.
si la distance est supérieure à 3500 km, les passagers peuvent obtenir une indemnisation de 600 €.

La CJUE a très récemment (29 juillet 2019) dû se pencher sur la portée de l’article 12 du Règlement (CE) no 261/2004 intitulé « Indemnisation complémentaire » qui dispose dans son paragraphe 1 :

« Le présent règlement s’applique sans préjudice du droit d’un passager à une indemnisation complémentaire. L’indemnisation accordée en vertu du présent règlement peut être déduite d’une telle indemnisation. »
Les faits de la présente affaire aérienne sont dépourvus de toute originalité.

Deux passagers arrivent à l’aéroport et apprennent qu’ils ne peuvent embarquer, faute de sièges disponibles. Les passagers sont alors ré-acheminés par le même transporteur (Blue Air) quatre jours plus tard alors qu’ils devaient reprendre le travail quatre jours auparavant.
En application du Règlement (CE) no 261/2004 sur les indemnisations en cas de retard, les deux passagers ont été indemnisés à hauteur du montant forfaitaire de 400 euros par personne.

Les victimes ont assigné le transporteur Blue Air devant la Judecătoria Bacău (tribunal de première instance de Bacău, Roumanie). Devant les juges nationaux, elles ont demandé que la compagnie Blue Air soit condamnée à leur payer respectivement 437 euros et 386 euros à titre de préjudice matériel, résultant d’une retenue sur salaire.

Las magistrats européens saisis d’une question préjudicielles devaient trancher la problématique liée à la prise en charge par le transporteur aérien du préjudice économique (perte de salaires, manque à gagner).
Les passagers retardataires ont obtenu gain de cause :

« (…) En premier lieu, l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91, doit être interprété en ce sens que le montant prévu à cette disposition ne vise pas à indemniser un préjudice tel qu’une perte de salaire, en deuxième lieu, ce préjudice peut faire l’objet de l’indemnisation complémentaire prévue à l’article 12, paragraphe 1, du règlement no 261/2004, et en troisième lieu, il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer et d’apprécier les différents éléments constitutifs dudit préjudice, ainsi que l’ampleur de l’indemnisation de celui-ci, sur la base juridique pertinente ».

La production de bulletins de salaires mentionnant la retenue pratiquée par l’employeur devra, a priori, suffire pour justifier de la réalité de la retenue et donc du droit à l’indemnisation de ce poste du préjudice désormais indemnisable par le transporteur aérien.
Notons que si la retenue est inférieure aux forfaits prévus par le Règlement, elle doit logiquement, être comprise dans le forfait acquis par le passager.