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LE FAIT D’ENDOMMAGER LA MARCHANDISE EN PASSANT SOUS UN PONT NE CONSTITUE PAS POUR UN TRANSPORTEUR UNE FAUTE INEXCUSABLE

Cour de cassation, chambre commerciale, 11 avril 2018, N° de pourvoi: 17-12975

Pour « déplafonner » la responsabilité du transporteur, l’article L.133-8 du code de commerce exige que l’ayant droit à la marchandise démontre, pour retenir la faute inexcusable faisant échec à la limitation de responsabilité, la réunion de 4 conditions suivantes :

1. Faute délibérée et volontaire.
2. Conscience de la probabilité du dommage.
3. Acceptation téméraire du risque.
4. Absence de raison valable de l’acceptation d’un tel risque.

Dans l’arreêt du 11 avril 2019 , la Cour de cassation ne retient pas la faute inexcusable.
Les deux derniers éléments psychologiques (conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire) sont les plus difficile à prouver.
En effet, la témérité peut être illustrée par une attitude « ça passe ou ça casse » ou « il y a un risque, je le prends et on verra bien ».
Une telle attitude, qui frôle la mauvaise foi, est naturellement rarissime de la part d’un professionnel moyennement diligent.
Dans cette affaire, le commissionnaire n’avait pas transmis au transporteur substitué les consignes de son client en se limitant à lui indiquer : « moyens nécessaires ; surbaissée » mais sans pour autant exiger l’organisation d’un transport exceptionnel permettant d’éviter de manière certaine le dommage.

Le pourvoi reprochait aux juges du fond ne pas avoir recherché si la faute inexcusable du transporteur, qui avait lui-même choisi l’itinéraire, ne résultait pas du défaut de vérification des dimensions de son chargement, pour lequel un transport surbaissé lui avait été demandé.

Pour la haute juridiction, le défaut d’une telle vérification ne permet pas de retenir la faute inexcusable au sens de l’article L.133-8 du code de commerce plus précisément dans sa composante psychologique (attitude téméraire).

« (…) Mais attendu que l’arrêt relève que le commissionnaire de transport, à qui son client avait, dans sa commande, transmis des consignes précises sur la nécessité d’un transport sur un porte-char surbaissé et indiqué les dimensions exactes de l’objet à transporter, ne les a pas transmises à la société Transports Révélaud, dont les seules instructions se résumaient à la mention : « moyens nécessaires ; surbaissée », sans exigence particulière de l’organisation d’un transport exceptionnel ; qu’il ajoute que, selon une expertise, le transport a effectivement eu lieu sur un plateau surbaissé et que, si la hauteur sous le tablier du pont était de moins de 4,30 m, bien que, réglementairement, les ouvrages d’art franchissant une voie départementale dussent avoir un tirant d’air de cette hauteur, aucun panneau ne signalait cette hauteur inférieure ; qu’en déduisant de ces seules constatations que le chauffeur n’avait pas, en passant sous le pont, commis de faute délibérée impliquant la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire, sans raison valable, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, ni sur le second moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ».